Beetlejuice Beetlejuice: Tim Burton ressuscite les morts dans une suite endiablée

« Beetlejuice, Beetlejuice » Tim Burton a pris soin de ne pas citer trois fois le nom du démon farceur dans le titre de son dernier film au cas où celui-ci réapparaitrait malencontreusement… La suite de Beetlejuice réalisé par le cinéaste en 1988 est un bon cru. Une comédie endiablée dans laquelle le spectateur est convié, tiré par les pieds via une trappe imaginaire. Le cinéaste explose les limites du conte pour inventer mille et un subterfuges dans son univers délirant à un rythme effréné. Une comédie enlevée, morbide et joyeuse qui regorge de monstruosités en tous genres. Tim Burton reprend son œuvre et la prolonge en y ajoutant des nouveautés réjouissantes tout en distillant de nombreuses références à ses films.

En pleine tragédie, la famille Deetz est contrainte de revenir à Winter River. Lydia est préoccupée par le souvenir de Beetlejuice mais aussi par sa fille Astrid, une adolescence plutôt rebelle. Nul doute que les choses ne se passeront pas comme le long d’un fleuve tranquille à Winter River.

L’ingéniosité de Tim Burton consiste à reprendre les personnages de la version originelle de 1988 en 2024, interprétés par les mêmes acteurs. La dimension du temps qui passe est cruciale dans ce récit partagé entre le monde réel et l’au-delà qui se moque de la mort avec malice. Reprendre les personnages originaux avec dans leurs rôles les mêmes acteurs va dans le sens narratif et crée une impression de réel très forte, même s’il s’agit d’une comédie horrifique burlesque. La vie s’écoule vraiment, comme en témoigne les visages des acteurs nourris de quelques rides et d’une trentaine d’années supplémentaires.
Michael Keaton regarde de nouveau par les yeux exhorbités de l’horripilant Beetlejuice. La jeune adolescente Lydia a bien grandi, est devenue une star de la TV, toujours campée par Wynona Ryder. Artiste désopilante à souhait la rousse Délia Deetz Catherine O’Hara, sa belle-mère est également de retour. Atout du film, la fille adolescente de Lydia, Astrid, est jouée par Jenna Ortega (figure phare de la série Wednesday réalisée par le cinéaste). Aussi caractérielle que sa mère au même âge, la jeune femme est dans le rejet familial. Les deux actrices portent le même regard brun à la fois sombre et éclairé qu’affectionne Burton chez ses héroïnes. Boulet ultime, Astrid est affublée d’un possible futur beau père aux allures de Dracula à l’eau de rose, Justin Theroux. Nouvelle muse dans l’oeuvre de Burton, Monica Belluci incarne une femme-Frankenweenie (court métrage de Tim Burton, 1984) extrêmement vampirisante…. Willem Dafoe dans un rôle d’autorité vient compléter ce casting très pointu.
La mort est au bout du chemin pour les protagonistes, quelque part, à n’importe quel âge, subite ou pas, toujours envisagée avec beaucoup d humour. Le guichet de l’au-delà qui accueille les «jeunes» morts ne désemplit pas, générant les mêmes impatiences et mécontentements qu’au sein d’une file d’attente administrative chez les vivants. La bande son est signée comme à son habitude par le compère du cinéaste, Danny Elfman, et reprend également l’hymne devenu signature du premier opus avec cette scène de danse et de possession des corps mémorable et joyeuse, Day-O (The Banana Boat Song) chantée par Harry Belafonte.

Beetlejuice, Beetlejuice fourmille de références à l’œuvre prolifique de Tim Burton de Frankenweenie, Vincent, ses premiers courts métrages, à l’étrange Noël de Mr Jack, Wednesday… Ce cinéaste génial démontre toujours autant de talent et ne perd pas l’inspiration de l’enfance pour ne s’imposer aucune limite dans cette comédie drôle, burlesque et légèrement sanguinolente.

Crédit photo Parisa Taghizadeh