
Cette interview sur le film L’Abbé Pierre de Denis Amar, comme le film et sa critique ont été réalisés bien avant de connaitre les méfaits que l’homme d’église aurait commis, révélés en 2024.
Des représentations de L’Abbé Pierre au cinéma, on retient la brillante interprétation de Lambert Wilson dans Hiver 54, L’Abbé Pierre de Denis Amar (1989). Dans L’Abbé Pierre, une vie de combats, Frédéric Tellier réalise un biopic inédit sur la figure de Henri Grouès, de son surnom Abbé Pierre et raconte la vie plutôt méconnue de ce grand homme de l’Histoire de France à l’origine d’Emmaüs. (A lire aussi : entretien avec Benjamin Lavernhe).
Cette fiction est un témoignage sur cette figure historique à l’origine de l’institution Emmaüs qui vient encore aujourd’hui en aide aux plus démunis. On sait peu qu’avant sa fondation l’Abbé Pierre a eu milles vies, lui qui, né dans les beaux quartiers de Lyon, n’aura de cesse de chercher sa place dans un monde complexe. C’est ce point de vue qui insuffle sa valeur à ce portrait intime magnifié par la voix-off du prêtre et incarné de chair par Benjamin Lavernhe. Le Sociétaire de la Comédie Française campe le religieux avec brio à travers ses luttes, ses conflits internes et dans son intimité de ses 25 à 94 ans. Prêtre, réquisitionné durant la seconde Guerre Mondiale, résistant, député, en vie associative, celui que l’on appelle « La voix des sans voix » a enchaîné les fonctions, toujours révolté, dans l’objectif de combattre les injustices et la pauvreté. Il formera un duo solidaire et solaire avec Lucie Coutaz, formidable Emmanuelle Bercot. Le cinéaste réhabilite cette religieuse, bras droit de l’Abbé Pierre oubliée des livres d’histoire, pourtant co-fondatrice d’Emmaüs. Michel Vuillermoz fait également partie de la distribution en tant que compagnon de l’institution.
Ce film s’inscrit dans une catégorie particulière en terme de genre cinématographique. Il s’agit d’un biopic, d’un drame et d’un film historique populaire dans un même élan. La transmission de l’Histoire de ce célèbre personnage aux plus jeunes est essentielle. Si la mise en scène plutôt classique est parfois maladroite (par exemple des splits screens pas toujours heureux), l’effort de reconstitution historique est bien là et nous offre un point de vue unique, intime, un portrait de ce personnage que l’on connait mythe avant l’homme. On aimerait que les scolaires soient nombreux à découvrir cet homme plutôt petit par la taille qui a réussit à soulever des montagnes. Le nombre de sans-abris dans notre société aujourd’hui est tel que la diffusion très large de cette oeuvre cinématographique parait indispensable.