Yalda, la nuit du pardon, un thriller choc de Massoud Bakshsi

Massoud Bakshsi frappe fort avec ce film de procès qui prend place au sein d’une chaîne de télévision iranienne, dans une émission de téléréalité nommée « Le plaisir du pardon ». On peine à croire que celle-ci s’inspire du réel puisqu’elle met en scène la grâce (ou non) d’un condamné à mort par la partie adverse. Le film était sélectionné à la Berlinale et a reçu le Grand prix à Sundance cette année.

Menottée, Maryam, entre dans les studios de télévision. Extrêmement nerveuse, la jeune femme attend que l’on vienne la chercher pour participer à l’émission. A 22 ans, elle est accusée d’avoir tué son mari, Nasser 65 ans. Un accident, dit-elle. Condamnée à mort, elle pourrait ce soir être sauvée par le pardon de Mona, la fille de Nasser qui lui fera face en direct devant des millions de spectateurs. Sa vie tient désormais à un fil.

© Somaye Jafari- JBA Production


Le récit nous offre un suspense insoutenable. Le générique de l’émission donne le ton avec ces plans de personnes pendues. On comprend l’enjeu, la mort sera ou non décidée ce soir, ordonnée par la décision de la partie adverse. L’émission coïncide avec la fête dans les foyers de « la nuit du pardon ».

Maryam, Sadaf Asgari est prise au piège et doit malgré elle participer au jeu des médias. Elle est aussi désespérée que Mona, Behnaz Jafari, face à elle reste droite et réservée. La mère de l’accusée exigera de ne pas trop maquiller sa fille, un peu de fond de teint sera bien suffisant pour avoir l’air convenable. Les tenues des femmes sont sobres. Dans ce cirque médiatique la femme ne peut être séduisante. Robes et voiles sombres ne laissent transparaitre que le visage. Face à cette uniformité des femmes, la mise en scène affirme le côté criard de l’émission télé, les décors sont clinquants. Lumières pétantes, fauteuils dorés garnis de velours bordeaux et sol bariolés.

© Somaye Jafari- JBA Production

Le film pose la question de la peine de mort et de la justice. Qui sommes-nous spectateurs pour participer à un tel jugement décidant de la vie d’un être ? Le principe de cette émission met en exergue la loi du Talion, le droit à la vengeance accordé par la société islamique à la société civile. Si la famille victime pardonne, la peine de mort se mue en peine de prison et le condamné doit alors payer « le prix du sang » à la partie adverse. Dans les faits, c’est dieu qui aura décidé du verdict entend-on. La question du droit des femmes est également en jeu. La notion de « mariage temporaire » ferait hurler plus d’une féministe. Le nouveau-né non reconnu par le père devient un bâtard… Ce film de procès pose toutes ces questions, renvoie le spectateur à lui-même et à l’image de la société à laquelle il appartient. Sa réflexion peut alors commencer.

Sortie le 14 octobre 2020.