Daily Cannes ! Il Pleut dans la maison de Paloma Sermon-Daï, Semaine de la Critique

Après le documentaire très remarqué sur son frère, Petit Samedi, présenté à la Berlinale et Bayard d’Or au FIFF à Namur, Paloma Sermon-Daï se lance dans la fiction avec Il pleut dans la maison (It’s raining in the house) et elle fait bien. Ce drame social profondément attachant a décroché le Prix French Touch du Jury à la 62ème Semaine de la Critique du Festival de Cannes.

Purdey, dix-sept ans, et son frère Makenzy, quinze ans, vivent avec une mère fantôme. Une femme alcoolique qui a du mal à s’occuper d’elle-même alors ses enfants, encore moins. Purdey est une combattante. Faux ongles bleus et regard azur, elle fait face à l’existence avec force du haut de ses dix-sept ans et cherche à s’extraire avec son frère de sa condition. Sa chambre étant en piteux état, elle squatte celle de son frangin. Excédée, elle fait des ménages dans l’espoir de s’inventer une nouvelle vie avec son cadet dont elle s’occupe depuis longtemps. Makenzy qui vivote de petits larcins est d’une sensibilité exacerbée qu’il refoule. Il souffre de l’abandon d’une mère qui oublie ses enfants. Devant l’indépendance prise peu à peu par sa sœur, les choses vont se compliquer pour l’adolescent. Paloma Sermon-Daï décrit avec humour et vivacité le quotidien de ces protagonistes en pleine campagne, comme cette scène où ils rapportent les commissions à pied à travers champs dans une scène humoristique pleine de tendresse.

Il pleut dans la maison est un de ces films qui vous renverse le cœur. Caractérisé par la justesse de son récit, il s’ancre dans le cinéma belge de manière indéniable. Par ses décors d’abord, la vérité des lieux qu’il investit avec cette nature profonde de Belgique. Ce lac et sa plage, personnage du récit que l’on aura reconnu si l’on connait le plat pays. Par ses protagonistes issus de la Belgique profonde et par son genre aussi. Ce drame propose du cinéma social dans la veine des frères Dardenne avec un soupçon de positif, d’horizon ouvert pour un avenir des personnages peut-être moins sombre. Car ces héros sont furieusement attachants. La cinéaste parvient à mettre en scène ses protagonistes avec beaucoup de sensibilité. Elle aime ses personnages, les filme de manière proche et rend de manière juste, sensible l’intimité de la fratrie. Elle illumine le grand écran par cette relation entre un frère et une sœur au millimètre avec cette familiarité et ces fous rires instinctifs que seuls ceux qui ont grandi ensemble connaissent naturellement en se regardant. Le film présente de nombreux moments de grâce mettant en scène la simplicité de la vie quotidienne adolescente et notamment cette relation avec leur copain Don. Comme cette conversation drôle et singulière qu’ils auront à trois, allongés sur le dos, sur des serviettes.

Paloma laisse un espoir d’évolution à ses personnages, même s’il n’est point question de happy end à l’américaine. Son récit troublant est à la fois d’une immense pureté, sensibilité et vérité. On sort bouleversé par ces deux ados courageux, interprétés par deux acteurs frères et sœur, Purdey et Makenzy Lombet et leur complicité de jeu rendue magistrale à l’écran.