Tout de suite Maintenant  : Pascal Bonitzer livre une comédie élégante sur le milieu de la finance – En salle le 22 juin

4C

L’ambitieuse Nora Stator (Agathe Bonitzer) franchit les portes d’une entreprise de finance dans laquelle elle vient d’être recrutée. Entre des patrons ambigus et toxiques (Lambert Wilson et Pascal Greggory), un collègue rival (Vincent Lacoste), et l’épouse du patron (Isabelle Huppert) au comportement pour le moins inadapté, la jeune femme devra louvoyer dans ce monde ultra-codifié. Et découvrir au passage un secret enfoui sur le passé sentimental de son père, un scientifique aigri (Jean-Pierre Bacri) que Nora et sa sœur, chanteuse extravertie (Julia Faure), soutiennent à bout de bras.

En bon observateur des mœurs contemporaines, Bonitzer donne à réfléchir sur le prix de la réussite. Et mène de front le portrait de jeune fille et le thriller financier glaçant, en mettant Nora face à ses choix tout en insistant sur la froideur des relations entre les personnages. Mention spéciale à Vincent Lacoste, inattendu en Rastignac moderne qui a échangé avec bonheur le T shirt d’ado contre le costume trois pièces. Rousse filiforme au troublant regard sombre, Agathe Bonitzer crève l’écran et joue superbement ce personnage impassible de Nora qui va faire ses armes puis fendre l’armure. Tout en tenant tête à la femme de son patron, Solveig Barsac (Isabelle Huppert, blonde pour l’occasion et très bien en grande bourgeoise alcoolique et blafarde), reflet plus âgé de ce qu’elle pourrait devenir. Bel anti-modèle pour Nora.

La grande force du film réside dans la structure d’un scénario extrêmement efficace, co-écrit par Agnès de Sacy (complice récurrente de Bonitzer, Zabou ou Valéria Bruni-Tedeschi). Le film se teinte aussi de fantastique à travers l’employée de maison un peu sorcière des Barsac (touchante Nicole Dogue), et la vision d’un chien qui surgit par trois fois dans le récit comme une mise en garde pour l’héroïne. Et dans ce film comme souvent chez Bonitzer, on retrouve un rapport au père complexe. Jean-Pierre-Bacri incarne Serge, le très tourmenté père de Nora. Au final c’est aussi un film moral que nous livre Pascal Bonitzer. Contrainte malgré elle de dépasser les erreurs du passé des aînés, Nora devra exister par elle-même pour ne pas n’être que « la fille de ». En somme, devenir adulte. Un conseil : Allez voir, tout de suite maintenant.