Song to Song de Terrence Malick, romance existentielle au coeur de la scène rock – En salle le 12 juillet

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Terence Malick se distingue dans le cinéma américain par sa singularité d’auteur qui assume des choix de mise en scène très tranchés, mais se caractérise aussi par un fort glissement de plus en plus marqué dans son œuvre vers un questionnement sur le divin et le pourquoi de l’existence. C’était très fort le cas dans The Tree of life, Palme d’or 2011 à Cannes, ça l’est ici dans Song to Song, à la différence que l’histoire prend place au sein de la scène musicale d’Austin. Le cinéaste questionne le divin au sein d’un environnement moderne qu’est le le milieu du rock, le tout à travers une histoire d’amour et c’est ce qui fait sans doute l’originalité de ce récit.

Song to Song

La jeune Faye Rooney Mara fait des avances à un producteur, Cook, Michael Fassbender, dans l’espoir d’aider sa carrière à prendre son élan. Elle tombe amoureuse de BV, Ryan Gosling, sans parvenir à oublier Cook. Le producteur, de son côté, va séduire une serveuse, Natalie Portman, qui va elle s’adapter à son train de vie débridé et finir par s’y perdre. Les histoires d’amour se croisent et s’opposent.

Song to Song

Terrence Malick fait appel à une pléiade d’acteurs jeunes et beaux pour incarner ce milieu de la scène rock, où les personnages évoluent dans de riches villas avec piscine ou drogues se mélangent avec alcool, soulignant le vide abyssal d’une certaine déperdition de ce milieu. Faye justifie ainsi une période de sexe violent par un besoin de « ressentir le vrai ». C’est le vide, le vide de sentiments, de ne pas se sentir exister. Une pléiade de bons acteurs font vivre cette histoire comme la solaire Rooney Mara dont la prestation est à souligner. Cate Blanchett fait également partie de la distribution, comme Patti Smith, Lykke Li, les Red Hot Chili Peppers et Iggy Pop.

Song to Song
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La narration est éclatée, de nombreuses ellipses nous font voyager dans le temps du récit à différents moments de la vie des protagonistes. Le cinéaste souligne ainsi la petitesse de la vie qui défile, vite, contrairement à la nature, au monde qui nous entoure toujours présent et stable. Le questionnement existentiel s’impose à l’image comme au son, et crée une dimension envoûtante, élevant l’histoire dans une dimension mystique. L’image est très esthétisante, les points de vue de caméra choisis avec soin, de nombreuses contre-plongées (notamment sur le ciel), l’utilisation du grand angle (déformations de perspective), des effets, les mouvements de caméra accentuent la poésie et le questionnement des personnages. Les voix-off successives des protagonistes, véritables voix-intérieures, se relaient : Qui suis-je ? Deviennent-ils ce qu’ils espéraient être ?

Song to Song

Song to song est une œuvre comme peu de films peuvent prétendre en être. Le dispositif de narration du cinéaste fabrique de l’artifice esthétisant dans ces milieux bourgeois d’Austin. On craint parfois de voir glisser le récit dans de l’esthétique pure, mais la logique de la démarche artistique de Terrence Malick est indéniable. Si The Tree of Life avait divisé la critique c’est aussi parce qu’il faut une certaine sensibilité pour apprécier ce genre de récit mystique qui offre une grande part à l’au-delà, l’inconnu, le divin et se laisser porter. Quoi qu’il en soit, Song to Song est une expérience narrative intéressante et fascinante.