On connait surtout Stanley Tucci comme acteur, mais il est aussi producteur et ça ne s’arrête pas là. Il signe, entre autres, le scénario et la réalisation de The Final Portrait, un biopic très fin du maître Alberto Giacometti que l’on approche avec légèreté dans cette comédie pour mieux appréhender sa personnalité.
L’histoire se situe durant deux semaines, à Paris dans les années soixante. Giacometti propose à son jeune ami américain, James Lors, Armie Hammer (Nocturnal Animals), de peindre son portrait. Prévu pour quelques heures, la réalisation du tableau se prolonge, allongeant la pose du modèle, sans certitude quant à sa finalité. L’écrivain, artiste et critique d’art rate ainsi son vol retour pour les Etats unis.

Cette fiction permet d’approcher l’intimité du peintre et sa manière de travailler. Geoffrey Rush (Le Discours d’un Roi) réalise une vraie performance en interprétant Le peintre. Lorsqu’il lâche à son modèle « qu’il est impossible de terminer un portrait », le mythe se fissure. On comprend mieux la blessure de l’homme et ce qui fait de lui un si grand artiste.
On découvre aussi l’antre misérable du peintre dans la ville lumière. Une simple cour, avec son atelier d’un côté et la chambre à coucher de l’autre, qu’il partage avec sa femme Annette, Sylvie testud. Modèle de courage et d’abnégation, cette dernière supporte les écarts de son mari qui a trouvé en la volatile Caroline, Clémence Poésy (Harry potter and the Deathly Hallows), prostituée de son état, une muse qui revient poser pour lui chaque soir. Diego son frère, Tony Shalhoub, collabore aussi à l’oeuvre de son frère dans cette maison-atelier.

On est frappé par la manière de vivre de l’artiste, qui au fond se moque du confort alors que sa femme lui réclame une salle de bain, des vêtements… Il jette les enveloppes d’argent gagné dans le désordre de son atelier sans aucune considération pour sa valeur. Cette découverte vue par les yeux de son modèle, James, à la fois effaré et amusé, engendre un certain effet comique.
Brosser le portrait d’un homme torturé et presque antipathique tant il est parfois asocial pouvait se révéler un écueil. Découvrir les choses à travers le point de vue de cet ami américain bcbg permet de voir le personnage avec légèreté et humour. Derrière la célébrité de l’oeuvre et l’être bourru pas forcément toujours sociable, on découvre ainsi le peintre et ses doutes, son manque de confiance en lui. Il dit se considérer incapable de terminer un portrait. C’est alors un artiste écorché que l’on regarde travailler. Construire l’oeuvre puis la déconstruire, voilà la manière de faire de Giacometti.