Avec Duelles, Olivier Masset-Depasse (Cages, Illégal) réalise un film de genre dans une banlieue typée à l’américaine des années 60. Dès la première image, ce thriller psychologique est esthétiquement parfait. Son scénario aux nombreux rebondissements se déroule dans une tension constante et échappe de peu au piège d’un sujet typiquement féminin.

Dans une zone résidentielle, deux pavillons de banlieue se jouxtent au calme des chants d’oiseaux piaillant dans les jardins. Un passage creusé dans les haies d’arbres est utilisé par deux petits garçons, Maxime et Théo, deux copains inséparables qui partent à l’école ensemble tous les matins. Fils de familles dont une mère est brune, Céline, Anne Coesens, et l’autre blonde, Alice, Veerle Baetens. Les voisines sont très amies. Un jour alors qu’Alice jardine, elle aperçoit de la fenêtre supérieure voisine le jeune maxime qui longe dangereusement la façade en appelant Popeye son chat, coincé plus loin. Alice l’appelle et court prévenir Céline… Mais c’est le drame, la chute. Maxime sera enterré.

Ce décès créera un sentiment étrange entre les deux mères. L’une semblant reprocher à l’autre la mort de son fils et la seconde étant possiblement atteinte d’une puissante culpabilité. Entre les deux familles le drame laissera la place aux non-dits et à des sentiments malsains comme le doute et le soupçon. Les deux héroïnes renvoient l’image des mères de familles des sixties bien sous tous rapports avec leur serre-têtes et leurs vêtements aux coupes parfaitement ajustées. Il faut saluer les performances d’actrices de Anne Coesens et Veerle Baetens qui constituent les piliers de ce récit en incarnant les deux mères bouleversées. Leurs maris incarnés par Arieh Worthalter et Mehdi Nebbou les soutiendront tant bien que mal, tandis que les garçons sont interprétés par Jules Lefebvre et Luan Adam.

Duelles est un film d’ambiance, très bien filmé, avec un rendu de l’image très esthétisant dont la direction photo est signée Hichame Alaouie. Derrière les sourires polis de cette banlieue irréprochable, la musique de Frédéric Vercheval nous rappelle que la réalité blesse. Le spectateur est constamment laissé dans cette ambiance étrange et un peu malsaine. Le sujet – Un thriller basé sur une amitié féminine dont découleront des jalousies – est très délicat, et évite de peu les pièges sous-jacents qu’il suppose et s’arrête à temps dans le récit.