L’oscarisé Sam Mendes (American Beauty, Skyfall) nous revient ce 8 janvier avec 1917, une fresque immersive qui prend place au cœur de la Première Guerre Mondiale. Le cinéaste s’est inspiré des histoires de son grand–père, Alfred Mendes, vétéran de la guerre 14-18 et décoré pour sa participation aux batailles sur le front belge. Si le film est une fiction, on ressent très fort la réalité vécue par les protagonistes pris dans une course effrénée contre la montre, dans laquelle on se projette avec eux à corps perdu. Le film vient de remporter le Golden Globe du Meilleur long métrage catégorie Drame et celui du Meilleur Réalisateur pour Sam Mendes, ce qui est sans doute de bonne augure pour les Oscars.
Sam Mendes nous convie à vivre un épisode de la guerre de 14-18 en suivant ses personnages dans une folle mission. Usant savamment de la grammaire cinématographique, avec son Directeur de la Photographie Roger Deakins, le cinéaste a décidé d’utiliser le plan séquence comme principe de base pour marquer la construction du récit. Excellente idée puisque ce processus rend l’immersion inévitable pour le spectateur, le plaçant au cœur du récit. 1917 débute ainsi par un long plan séquence dans les tranchées, côté britannique, qui amène le spectateur à s’identifier aux personnages et à développer de l’empathie pour eux. Cet aspect immersif provoque également un terrible suspense.
Un gradé vient ordonner à Blake, Dean-Charles Chapman (Game of Thrones), une mission, lui indiquant de désigner un camarade pour l’accompagner. Ce sera son ami Schofield, George MacKay. Ensemble ils apprendront l’écrasante responsabilité de cet absurde mandat et sa dangerosité. Les vies de 1600 hommes sont en jeu, dont celle du frère de Blake, ce qui constitue bien sûr pour son jeune frère un challenge désespéré. Les deux hommes doivent porter un message à une autre unité de l’armée afin de stopper une attaque prévue le lendemain à l’aube en traversant les lignes ennemies.
Le casting est parfait. Blake et Schofield portent tous deux la jeunesse et l’innocence sur leur visage et c’est troublant. Cela nous rend ces comédiens encore plus attachants. Blake a un visage rond avec de grands yeux bleus tandis que celui du plus âgé, Schofield, est pigmenté de tâches de rousseur. On retiendra longtemps après le film le visage de ce dernier dont la prestation est remarquable. Ces deux acteurs parviennent réellement à nous émouvoir.
Sam Mendes insuffle une ambiance tout en tension dans le cheminement de ces protagonistes, en montrant la stupidité de la guerre. La solitude des personnages est profonde dans ce no man’s land et l’on ignore où se trouve l’ennemi. La nature est aussi très présente. Au début du film les soldats dorment assis au milieu des arbres et évolueront ensuite dans des paysages indéfinissables détruits par l’ennemi, comme ces cerisiers en fleurs abattus qui rappelleront à Blake sa grand-mère. Sam Mendes signe un vrai film pacifiste, hommage à son grand-père et complètement immersif. Le cinéaste refuse l’abondance d’effets car la trame est ténue et c’est justement cette simplicité qui créée la richesse narrative. Cela permet à la peur de s’installer chez le spectateur comme chez les personnages au beau milieu de ce no man’s land. Un film à la fois brillant et émouvant.