
Devant une oeuvre cinématographique de Quentin Dupieux, on ne sait jamais où le cinéaste va nous emmener. C’est le cas de Mandibules. On ignore où l’on va passer cette prochaine heure dix-sept et avec quels personnages. Sauf que pour le coup, on est bien assis devant le grand écran (eurêka). Après s’être intéressés aux « objets » vivants : Le Daim, Rubber, c’est finalement de manière assez naturelle que le cinéaste personnifie à son tour l’animal dans cette improbable comédie multigenre qui tient à la fois du road-movie, du western et du fantastique.

Manu doit transporter une mystérieuse valise pour gagner de l’argent. Il emmène son pote Jean-Gab, vole une vielle Mercedes et découvre une mouche géante dans le coffre. Le lieu et l’intrigue chez Dupieux comme souvent sont improbables. Ici les personnages vivent dans une région au sable chaud, un lieu paradisiaque ressemblant aux plages de la riviera, camaïeu de pinède près de la mer bleue. Il y a pire.

Un duo de bras-cassés malmène le récit de ses propres aventures. Manu, Grégoire Ludig et Jean-Gab, David Marsais sont deux anti-héros, amis d’enfance aux colliers de coquillage, cheveux aux épaules, chemises longues et bermudas, qui, un peu simples, se concentrent pour réfléchir au mieux à leurs stratégies. Et même si ce n’est pas gagné, satisfaits et fiers d’eux-mêmes ilscheckent fièrement en lançant « Taureau! », rappelant fortement le duo de Wayne’s world (en plus sobre). Dupieux place sur leur chemin un éventail de protagonistes habités et bien castés. India Hair interprète avec beaucoup de naturel cette jeune femme qui reconnait Manu malgré lui et l’invite chez elle. A contre-emploi, Adèle Exarchopoulos surprenante et hilarante livre une très belle performance d’actrice dans le rôle d’Agnès. On note également au casting la présence de Roméo Elvis, Coralie Russier et Bruno Lochet.

Dans son épurement le scénario tient la route, même avec ces aventures rocambolesques (la blonde qui reconnait Fred et l’invite dans la superbe villa avec piscine de ses parents..). Comme toujours chez le cinéaste l’extraordinaire n’est pas là où on l’attend et la réalité s’en trouve un peu décalée. Sa mouche géante n’a bien sûr, rien à voir avec celle de Cronenberg. Effrayante au premier regard, elle deviendrait ici presque attachante. Ici l’objet se transforme en une bébête dont il faut s’occuper et nourrir, avec beaucoup d’humour, challenge pour d’ambitieux pieds nickelés qui devront louvoyer avec la réalité.
Sortie en salle le 9 juin, ne le râtez pas!