La lutte des classes est une comédie aussi déjantée et dérangeante que l’était Le nom des gens en 2010. Michel Leclerc réalise ici une comédie rythmée et drôle, qui se confronte à certaines réalités de la société française et notamment le vivre ensemble.
Sofia et Paul emménagent dans une petite maison de banlieue parisienne, qu’observait Sofia de sa tour de cité quand elle était petite. C’était le quartier de son enfance. Paul, rockeur punk-rock un peu à la traîne, a connu son petit succès dans les 80’s avec Bérurier Noir. Toujours son mot à dire, il se lance régulièrement dans de grandes théories auxquelles il va devoir se confronter. Leur fils Corentin est élève à Jean Jaurès, l’école primaire du quartier, celle où avait jadis étudié Sofia. Lorsque tous les copains désertent l’école publique pour l’institution catholique St Benoit, Corentin se sent seul. Comment les parents peuvent-ils rester fidèles à l’école républicaine quand leur enfant ne prétend plus y mettre les pieds? Face à leurs inquiétudes parentales, Sofia et Paul vont devoir se confronter à leurs valeurs quitte à bousculer leur couple, secoué par la lutte des classes.
Michel Leclerc réunit un joli casting pour cette comédie haute en couleurs aux dialogues cinglants. Sofia, Leïla Bekhti, est aussi fraîche et dynamique que Paul, Edouard Baer, est profondément dogmatique et provocateur. Le malicieux directeur d’école qui préfère prêcher le faux auprès des élèves pour obtenir le vrai, est interprété par Ramzy Bedia. Baya Kasmi, Mademoiselle Delamarre, campe une prof un peu perdue avec ses discours alambiqués, « On ne dit pas terroriste mais individu à caractère intrusif ».
Le Scénario plonge les personnages dans des situations cocasses qui reflètent parfois une certaine réalité communautaire et ont le mérite de questionner la société. La lutte des classes a pris des couleurs, et de cette école de banlieue s’exilent les petits blancs que leurs riches parents envoient dans une école privée. Sofia et Paul vont être confrontés à des situations surprenantes qui les laisseront dépourvus. A la sortie de l’école, seul père venu chercher sa progéniture, entouré de femmes voilées, le rockeur se retrouvera incapable d’engager la conversation. Dans la même situation Sofia discutera sans problèmes avec les mères. Corentin rentrera de l’école inquiet. Tout le monde croit en dieu à l’école publique, il demandera à ses parents « Et nous on est quoi ? ». Quid de la laïcité à l’école ? Comment se sent un enfant qui, sans être « défini » pense qu’il ne croit en rien?
Le genre de la comédie est un moyen efficace et diplomate pour poser concrètement les problèmes du vivre ensemble et évoquer des pistes de solutions. D’autant plus que Michel Leclerc s’y attelle avec humour et intelligence. Le constat établi par les adultes montre par exemple l’absence à la chorale et au cinéma de nombreux élèves. Le film questionne ainsi l’accès à la culture de chacun, quelles que soient ses origines. Il pose le vivre ensemble comme une lutte qui débute par la volonté, notamment ici à travers ce couple de parents remplis de bonnes intentions.