César Diaz (entretien) a remporté la Caméra d’Or au 72e Festival de Cannes après avoir reçu le Prix SACD à la Semaine de la Critique pour Nuestras Madres. Le film est maintenant le candidat officiel de la Belgique aux Oscars – (sélection à suivre!).
Premier long métrage de César Diaz, Nuestras Madres (Our Mothers) est un drame troublant qui est présenté à la Semaine de la Critique au Festival de Cannes. Une enquête centralise le récit, oscillant entre fiction et réalité et dresse un portrait amer du Guatemala d’aujourd‘hui. Car en 2018, les procès des militaires à l’origine de la Guerre civile s’enchaînent. Les personnages de l’histoire sont les témoins directs de l’époque la plus dure de la guerre civile, de 1978 à 1984, durant laquelle nombreux de leurs proches ont disparu. Les femmes sont seules rescapées de ces horreurs dans un pays qui commence seulement à ouvrir les yeux, comme s’il s’était endormi pendant toutes ces décennies.
Nicolasa, Aurelia Caal, petite indienne âgée vivant au fin fond de la jungle guatémaltèque, arrive à la capitale pour demander au gouvernement d’exhumer le corps de son mari, tué et enterré sur les terres proches de son village. Elle ne « supporte plus de vivre avec ses morts » déclare-t-elle simplement, épuisée. Elle souhaite le changer de lieu et pouvoir dialoguer avec lui. Ernesto, jeune anthropologue à la Fondation médico-légale qui travaille à l’identification des disparus, lui viendra en aide. Il a lui-même perdu son père, ancien guérillero, durant cette folle période et croit déceler une ressemblance troublante avec lui sur une photo ancienne que lui montre la vieille femme. Cristina, quant à elle, la mère du jeune homme, s’est enfermée dans un mutisme et ne souhaite pas évoquer le passé.
Lors de sa venue au village de Nicolasa, Ernesto découvrira que toutes les femmes viennent l’implorer pour demander compensation au gouvernement. Regard droit et sincère, Ernesto, est interprété par Armando Espitia totalement convaincant. Cristina, sa mère, Emma Dib, reste un témoin muet du passé, et reste figée dans les idéaux des guérilleros pour lesquels beaucoup sont morts. Une séquence de portraits muets de vieilles femmes, nous rattachera soudainement au réel et l’on comprendra la fragilité de la porosité entre fiction et réel.
Nuestras Madres est un drame profond, cathartique et nécessaire, qui revient sur le passé douloureux et toujours honteux d’un Guatemala où la population, comme les protagonistes ne trouvent pas la paix. Cette fiction très réussie au goût de réel recèle une troublante valeur documentaire.