
Haute Couture est une émouvante comédie dramatique de Sylvie Ohayon sur la transmission d’un savoir-faire à travers les générations et les origines. La cinéaste offre un très beau rôle à Nathalie Baye, vibrante d’émotion en Esther, Première d’atelier au sein de la maison Dior.
Esther prépare ce qui sera sa dernière collection Haute Couture pour la maison Dior avant de prendre sa retraite. Alors qu’elle se rend à son travail, on lui vole son sac dans le métro. Prise de remords par ce vol, Jade, 20 ans, décide de lui restituer son bien. Sensible aux mains bien faites et dédiées au travail précis de couturière, Esther est persuadée que la jeune fille a un don et l’engage comme apprentie.
Au-delà de quelques maladresses narratives la qualité de jeu des comédiennes rend le récit touchant. Nathalie Baye insuffle ainsi une belle véracité à son personnage. Diabétique, Esther avale du chocolat au réveil et parle à ses roses avant de partir « Soyez sages, soyez belles! ». Le travail représente toute la vie de cette femme qui ne souhaite pas vraiment entamer sa retraite. Si elle évolue dans un monde hyper précieux, elle est aussi entière, vraie et ne s’embarrasse pas pour dire ce qu’elle pense, « Je me fais chier ». Cette préciosité accolée à cette franchise font la qualité d’écriture de cette protagoniste à la fois guindée et nature.
Banlieusarde arabe et catholique, Jade, Lyna Khoudri, traine avec sa copine Souad, Soumaye Bocoum. La jeune fille est coincée dans une vision clichée de la Banlieue « T’es pas française, t’es banlieusarde » qui l’emprisonne, l’oblige à ne pas se considérer française et à vivre en opposition avec Paris et « ses riches ». Le traitement de la banlieue est un tantinet caricatural, et la mère dépressive interprétée par Clotilde Courau n’enlève rien au pathos. La rencontre entre Jade et Esther est explosive. Esther brisera les clichés pour avancer et guider la jeune fille rebelle.
Sylvie Ohayon nous convie dans les ateliers Haute Couture et la minutie du geste du travail est scrupuleusement rendue à l’écran. Travailler de ses mains signifie revenir à l’essentiel, les ateliers sont filmés avec beaucoup de délicatesse et l’on y entend les silences, le froissement des tissus, comme le craquement du vieux plancher de cet hôtel particulier Christian Dior. La cinéaste rend un hommage à la création, au savoir-faire des couturières dont on citera notamment Pascale Arbillot et à sa transmission avec des comédiennes couturières qui évoluent bien ensemble.