TORI ET LOKITA, Les Dardenne ciblent l’immigration en Europe dans un drame coup de poing

Après deux Palmes d’or, les frères Dardenne revenaient à Cannes en Compétition Officielle avec Tori et Lokita, l’un de leurs plus grands films. Un drame social, direct et implacable qui touche au cœur le spectateur. Le dernier long métrage de ces habitués de la Croisette a décroché un prix exceptionnel, celui du 75ème Festival de Cannes. (A lire aussi : Entretien avec les cinéastes).

Lokita, seize ans et son petit frère, Tori, douze ans, ont immigré d’Afrique en Belgique et cherchent à s’y installer. Le jeune Tori a déjà ses papiers et vit dans un centre, tandis que Lokita doit les obtenir.

L’entretien de Lokita en ouverture du film est d’une puissance terrible. Plan séquence fixe sur le visage de Lokita qui répond aux questions posées hors champ, interrogatoire intrusif et inacceptable d’une enfant de 16 ans.
Joely Mbundu et Pablo Schils sont tous deux acteurs non professionnels et livrent une performance à saluer. Les deux mineurs non accompagnés, comme il en existe des milliers en Europe, vont devoir pour survivre rembourser leur dettes et travailler dans des réseaux mafieux. Ces enfants « réfugiés » vont vivre une descente aux enfers et connaître l’enfermement. Les cinéastes ne laissent au spectateur aucune alternative dans ce drame intimiste qui résonne universellement. Le sentiment d’oppression pour le spectateur est intense, proportionnel au drame de ces deux enfants confrontés à la dureté du monde des adultes.

Comme dans les grands longs métrages des cinéastes on est scotchés au récit, embarqués. Et l’émotion nous envahit avec force. On peut rechigner face à un thriller que l’on sait partir inexorablement vers le pire et manquer d’une fenêtre, d’un petit rayon de soleil. A travers cette fiction poignante qui résonne dans le réel et ces deux personnages attachants unis par l’amour, les cinéastes nous transmettent un message à nous, spectateurs. C’est à nous de trouver ce rayon de soleil et d’espoir en Europe. Agissons.

Photo Christine Plenus