
Joyland est un drame familial éclairé de Saim Sadiq qui prend place au Pakistan. Un récit de vie aux protagonistes multiples formidablement raconté. Ce premier long métrage a décroché le Prix du Jury Un Certain Regard à Cannes cette année, la Queer Palm et est le représentant contesté du Pakistan aux Oscars. La sortie du film y a été uniquement autorisée dans le district de Lahore où le film a été tourné et dans une version dont certaines scènes ont été coupées.
Joyland est le plus ancien parc d’attractions de Lahore, capitale de la province pakistanaise du Punjab ou les gens viennent oublier tous leurs soucis. Mumtaz aime travailler, mais dans ce patriarcat intraitable, il lui faudra renoncer le jour où son mari sans emploi aura retrouvé du travail. Après des années sans travailler, Haider décroche enfin un poste de danseur dans un théâtre érotique. Travail honteux aux yeux de beaucoup, il cache son activité. Il fait alors la connaissance de Biba (formidable Alina Khan), une femme transgenre avec qui il répète les chorégraphies des spectacles. Ses certitudes vont valser.
Toute la famille de Haider, Ali Junejo, vit dans la même maison, sous la direction d’un père autorisé par la société patriarcale à régir la vie de chacun. Lui et sa femme Mumtaz, Rasti Farooq, cohabitent avec le frère de Haider, Sohail Sameer, sa femme enceinte, Sarwat Gilani et leurs trois enfants. La solidarité familiale et le devoir emprisonnent le couple enjoué que forment Haider et Mumtaz, piégés dans l’obligation de répondre aux diktats d’une société écrasante. Le scénario est particulièrement précis dans l’entremêlement de vies des personnages, de leurs besoins et de leur être profond. Les protagonistes sont enfermés dans leur condition et sont souvent des êtres malheureux, empêchés, aux prises avec des obligations traditionnelles religieuses, patriarcales, qui nient l’humain. Saim Sadiq dévoile un formidable tissage de relations mis en exergue par un jeu d’acteur solide soutenu par un très bon casting qui transcende la narration.
Sous cette fiction transparait le politique, dans un monde conservateur où l’homme n’est pas libre, comme la femme et où le mariage arrangé est une norme. L’homosexualité est interdite et la transidentité malmenée.