Ama Gloria de Marie Amachouleki, L’éveil des sens au Cap-Vert

Délicatement mis en scène par la réalisatrice Marie Amachouleki, Alma Gloria débute par une paire de lunettes neuves adaptées à la jeune Cléo, six ans. Un objet précieux pour découvrir le monde qui l’attend dans un film vibrant et fort. Un drame vécu à travers une relation fusionnelle entre une nourrice immigrée et une petite parisienne. Ce premier long métrage assurait l’ouverture de la Semaine de la Critique du 76ème Festival de Cannes. A lire aussi : entretien avec Marie Amachouleki.

La jeune Cléo aime beaucoup sa nounou qui l’élève depuis sa naissance mais Ama Gloria doit d’urgence retourner au Cap-Vert auprès de ses enfants. Cléo lui fait promettre de la revoir. L’occasion d’un premier et dernier été ensemble sur l’île. En rejoignant « sa mère de substitution » chez elle au Cap-Vert, Cléo va se confronter au monde. Se frotter aux premières expériences de la vie, confortée par la force de cette relation unique dont elle éprouvera avec angoisse les limites. Elle fera également la connaissance des enfants de Ama Gloria, que celle-ci a laissés pour travailler en France.

Frisottis et lunettes sur le nez, Louise Mauroy-Panzani irradie d’un charme irrésistible de l’enfance et crève l’écran. Elle forme un parfait duo avec Ilça Moreno Zego qui interprète son aimante nourrice. Le père de Cléo souvent absent est incarné par le charismatique Arnaud Rebotini.

La mise en scène imaginative sied parfaitement au récit. La cinéaste exprime les moments émotionnels forts ressentis par la petite fille avec l’animation. Procédé narratif joli et sobre pour exprimer les émotions internes ressenties par la petite fille qu’elle ne peut exprimer.

Marie Amachouleki propose un sujet très rare sur les relations nord-sud. Ama Gloria réunit de nombreuses problématiques outre la principale, le lien qui unit ces deux êtres sans liens du sang. Le lien maternel se crée ainsi sans qu’il n’y ait de filiation biologique. Le film montre également l’absurdité géographique de l’économique mondiale. Travaillant en France pour subsister aux besoins des siens restés au Cap-Vert, Ama Gloria crée une nouvelle relation filiale avec la jeune Cléo, alors qu’elle « abandonne » ses propres enfants pour les nourrir. Les relations d’amour se créent ainsi en parallèle poussées par une économie mondiale déséquilibrée entre le Cap-Vert et l’Europe. Indépendamment de cette situation, les relations humaines prennent le pas sur tout le reste et le film déborde d’amour. L’amour dépasse ainsi la géographie, la culture, la couleur de peau comme les liens du sang.

Sortie dans les salles belges le 20/09/23.