Dalva a tout emporté sur son passage lors de la 13e Cérémonie des Magritte du cinéma ce samedi 9 mars au Théâtre National Wallonie-Bruxelles. Le premier long métrage d’Emmanuelle Nicot remporte 7 Magritte dont ceux du Meilleur film, de la Meilleure Réalisation, du Meilleur Premier film et du Meilleur Scénario Original. La jeune actrice Zelda Samson décroche quant à elle le prix du Meilleur Espoir et Sandrine Blancke celui de la Meilleure Actrice dans un second rôle.
« Trois enfants par classe sont aujourd’hui victimes d’inceste » souligne Julie Esparbes productrice du film à l’équipe en majorité féminine. Le Magritte du Meilleur Son, fait rare dans cette spécialité masculine, est attribué à un cast également en partie féminin avec Valérie Le Docte (monteuse son) et Aline Gavroy (ingénieure du son et mixeuse émérite), des essentielles du cinéma belge.
L’histoire de Dalva, petite fille victime d’inceste est subtilement racontée de son point de vue d’enfant troublée sous l’emprise d’un adulte. Le film résonne avec l’actualité et les nombreux appels de Judith Godrèche contre l’emprise exercée par les adultes sur les enfants.
A partir d’un itinéraire cinématographique initié à la Semaine de la Critique au festival de Cannes, Dalva a remporté de nombreux Prix. Le film a valu à Zelda Samson le Prix Fondation Louis Roederer de la Révélation pour son premier rôle à la Semaine de la Critique a également reçu le Prix FIPRESCI (Prix de la Critique internationale) lors du dernier Festival de Cannes. Il a entre autres également décroché le Prix CAVENS 2023 de l’Union de la Critique Cinématographique belge.

Entretien avec Emmanuelle Nicot après la Cérémonie (Photo Copyright Content Curation/ Kristof Pierco-MDC2024)
Le film trace un véritable chemin depuis la Semaine de la Critique au Festival de Cannes. Que vous inspire le fait de vous retrouver aujourd’hui en Belgique avec tous ces Magritte ? C’est une immense récompense de la part de mes pères et de mes mères. C’est vrai que le film a été beaucoup primé en festival mais toujours par des jurys que je ne connaissais pas. Je ne connais pas non plus grand monde à l’académie des Magritte (rires), mais je suis extrêmement touchée que les gens du cinéma belge aient eu envie de me récompenser ainsi, je ne m’y attendais pas du tout.
Y avait-il dans l’équipe quelque-chose qui vous liait de l’ordre de la famille pour réaliser ce film? Dans le suivi avec l’équipe c’est un film que j’ai fait accompagnée de ma chef opératrice et de ma scripte qui sont mes deux meilleures amies. Deux jeunes femmes avec qui j’ai fait l’école, avec qui j’ai grandi, donc là on est vraiment dans la famille. Mes productrices sont aussi des personnes dont je suis extrêmement proche. Et oui, toute cette équipe ce sont des gens qui sont devenus tellement mes amis. Mon chef son en a parlé, c’est un film que j’ai fait en même temps que mon premier enfant et l’ambiance sur le tournage était vraiment particulière. J’ai plongé les gens un peu dans mon intimité bien sûr avec mon tire-lait et mon enfant qui n’avait que quelques mois ! (rires) et avec qui je faisais absolument toutes les réunions, tous les castings, tous les essayages de costumes, comme la recherche des décors. Et c’est vrai que c’est devenu très intime, très familial cette relation que j’ai eu avec cette équipe. On a noué des liens très forts qui sont toujours là.
Avez-vous des projets? C’est encore trop tôt pour que j’en parle mais oui je suis enceinte d’un nouveau projet ça c’est sûr, mais je ne vous dirai pas si c’est une fille ou un garçon, je le garderai pour moi ! Je suis en train d’écrire actuellement.
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Ce 9 mars, Augure de Baloji (entretien) a quant à lui décroché 5 Magritte. Yves-Marina Gnahoua remporte le Prix de la Meilleure actrice dans un Second Rôle (ex aequo avec Sandrine Blancke). Le Magritte de la Meilleure Image, de la musique Originale, des Meilleurs Décors et des Meilleurs costumes sont également attribués à Augure.
Arieh Worthalter réussit un beau doublé et remporte le Magritte du Meilleur Acteur pour Le Procès Goldman de Cédric Kahn et celui du Meilleur Acteur dans un second rôle dans Rien à Perdre de Delphine Deloget. Lubna Azabal décroche le Prix de la Meilleure Actrice dans Le Bleu du Caftan de Maryam Touzani.
Séquence émotion avec le Magritte d’Honneur remis à l’actrice Aurore Clément pour sa carrière avec un doux message en vidéo du cinéaste Wim Wenders qui lui confie l’avoir découverte à San Francisco dans Apocalypse Now de Francis Ford Coppola « Une femme seule entourée de mecs » qu’il a admiré et engagée ensuite dans son célèbre Paris, Texas. Il a pensé à elle dit-il, pour « Sa simplicité sa présence son humanité ». Aurore Clément c’est aussi une amitié cinématographique avec Chantal Akerman avec qui elle travaille à six reprises sur le grand écran et incarne le mystérieux personnage d’Anna « Anna c’est moi, c’est nous tous, c’est nous toutes » déclarera l’actrice. La liste de ses collaborations avec des cinéastes est longue : Louis Malle, Isabelle Nanty, Bertrand Bonello, François Ozon, Mathieu Amalric, Serge Gainsbourg, Sofia Coppola….
Un gros regret restera l’absence au palmarès de l’excellent thriller Temps Mort de la réalisatrice Eve Duchemin qui était nommé en catégorie Meilleur film et Meilleur Premier film. Sa brève sortie en salle dans un seul cinéma à Bruxelles explique-t-elle l’invisibilisation de ce film, même si les votants ont accès au film en VOD? C’est une vraie question au vu de la qualité de ce long métrage de fiction dont la réalisatrice recevait le Magritte du Meilleur Documentaire en 2017 pour En Bataille, portrait d’une Directrice de prison.
Comme le festival de Berlin ou les Césars précédemment, la Cérémonie des Magritte n’a pas échappé à une incursion politique. Le lendemain de la journée des droits des femmes à été l’occasion pour le Président Bouli Lanners de souligner que « Le harcèlement l’abus de pouvoir et le viol ne feront plus partie de ce métier si nous avons le courage de changer ». Puis c’est au tour d’un Collectif d’affirmer son entière solidarité avec les Palestiniens et des victimes de l’attentat du 7/10 avec une demande faite au gouvernement belge : Un cessez le feu à Gaza, l’arrêt des exportations d’armes et la libération des otages. Le collectif a souligné sa solidarité avec tous les peuples victimes de génocide comme actuellement au Congo, « Nous ne détournons pas le regard ». Arieh Worthalter et Lubna Azabal se sont également exprimésen recevant leur Prix. Lubna Azabnal a appelé à un cessez le feu à Gaza et une libération de tous les otages « Et pas au compte-goutte por favor ».
PALMARES
MEILLEUR FILM
Augure de Baloji
Dalva d’Emmanuelle Nicot
Le paradis de Zeno Graton
Le syndrome des amours passées d’Ann Sirot et Raphaël Balboni
Temps mort d’Eve Duchemin
MEILLEUR PREMIER FILM
Augure de Baloji
Dalva d’Emmanuelle Nicot
Le paradis de Zeno Graton
Temps mort d’Eve Duchemin
MEILLEURE RÉALISATION
Baloji pour Augure
Emmanuelle Nicot pour Dalva
Zeno Graton pour Le paradis
Ann Sirot et Raphaël Balboni pour Le syndrome des amours passées
Ann Sirot et Raphaël Balboni pour Le syndrome des amours passées
MEILLEUR DOCUMENTAIRE
Adieu sauvage de Sergio Guataquira Sarmiento
Le balai libéré de Coline Grando, produit par Cyril Bibas
Se crasher pour exister de Julien Henry
Une jeunesse italienne de Mathieu Volpe
MEILLEUR FILM FLAMAND
Débâcle de Veerle Baetens
Holly de Fien Troch
Luka de Jessica Woodworth
Wil de Tim Mielants
MEILLEUR SCÉNARIO ORIGINAL OU ADAPTATION
Baloji pour Augure
Emmanuelle Nicot pour Dalva
Zeno Graton et Clara Bourreau pour Le paradis
Ann Sirot et Raphaël Balboni pour Le syndrome des amours passées
MEILLEUR FILM ÉTRANGER EN COPRODUCTION
Interdit aux chiens et aux Italiens d’Alain Ughetto coproduit par Manuel Poutte (Lux Fugit Film)
Le bleu du caftan de Maryam Touzani, coproduit par Sebastian Schelenz (Velvet Films)
Retour à Séoul de Davy Chou, coproduit par Cassandre Warnauts et Jean-Yves Roubin (Frakas Productions)
Vincent doit mourir de Stephan Castang, coproduit par Jean-Yves Roubin et Joseph Rouschop (Gapbusters)
MEILLEURE ACTRICE
Yolande Moreau dans La fiancée du poète
Mara Taquin dans La petite*
Lubna Azabal dans Le bleu du caftan
Lucie Debay dans Le syndrome des amours passées
MEILLEUR ACTEUR
Jérémie Renier dans Ailleurs si j’y suis
Marc Zinga dans Augure
Arieh Worthalter dans Le procès Goldman*
Bouli Lanners dans Un coup de maître
MEILLEURE ACTRICE DANS UN SECOND RÔLE
Myriem Akheddiou dans 16 ans
Lucie Debay dans Augure
Yves-Marina Gnahoua dans Augure
Sandrine Blancke dans Dalva
MEILLEUR ACTEUR DANS UN SECOND RÔLE
Philippe Résimont dans L’employée du mois
Peter Van den Begin dans L’employée du mois
Jean-Benoît Ugeux dans Last dance
Arieh Worthalter dans Rien à perdre*
MEILLEUR ESPOIR FÉMININ
Bérangère McNeese dans Ailleurs si j’y suis
Zelda Samson dans Dalva
Laetitia Mampaka dans L’employée du mois
Mara Taquin dans La bête dans la jungle
MEILLEUR ESPOIR MASCULIN
Amine Hamidou dans Le paradis
N’Landu Lubansu dans Le paradis
Lazare Gousseau dans Le syndrome des amours passées
Yoann Zimmer dans Retour à Séoul
MEILLEURE IMAGE
Joachim Philippe pour Augure
Caroline Guimbal pour Dalva
Florian Berutti pour L’autre Laurens
MEILLEUR SON
Jan Deca, Erik Griekspoor, Danny van Spreuwel et Vincent Nouaille pour Augure
Fabrice Osinski, Valérie Le Docte, Aline Gavroy et Olivier Thys pour Dalva
Dirk Bombey, Emilie Mauguet, Xavier Thieulin et Bertrand Boudaud pour Vincent doit mourir
MEILLEURS DÉCORS
Eve Martin pour Augure
Catherine Cosme pour Dalva
Julien Dubourg pour Le syndrome des amours passées
MEILLEURS COSTUMES Cette année, la catégorie “Meilleurs Costumes” comprend 4 nominés dû à des ex-aequo.
Elke Hoste et Baloji pour Augure
Claire Dubien pour L’étoile filante
Frédérick Denis pour Le syndrome des amours passées
Jessica Harkay pour The Belgian wave
MEILLEURE MUSIQUE ORIGINALE
Baloji pour Augure
Thomas Turine pour L’autre Laurens
Stéphanie Blanchoud, Benjamin Biolay et Jean-François Assy pour La ligne
MEILLEUR MONTAGE
Bruno Tracq et Bertrand Conard pour Augure
Sophie Vercruysse et Raphaël Balboni pour Le syndrome des amours passées
Bertrand Conard pour Tengo sueños eléctricos
MEILLEUR COURT MÉTRAGE DOCUMENTAIRE
En attendant les robots de Natan Castay
Journal d’une solitude sexuelle de Nina Alexandraki
Les heures creuses de Judith Longuet-Marx
On mothers and daughters in times of injustice de Talia Jawitz
MEILLEUR COURT MÉTRAGE DE FICTION
Beyond the sea de Hippolyte Leibovici
Les silencieux de Basile Vuillemin
Se dit d’un cerf qui quitte son bois de Salomé Crickx
Un bon garçon de Paul Vincent de Lestrade
MEILLEUR COURT MÉTRAGE D’ANIMATION
Les marrons glacés de Delphine Hermans et Michel Vandam
Pina de Giuseppe Accardo et Jérémy Depuydt
Va-t’en, Alfred ! de Célia Tisserant et Arnaud Demuynck
Voyage en amnésie d’Anouk Kilian-Debord
Photo de couverture: L’équipe de Dalva, Copyright Content Curation/ Kristof Pierco-MDC2024
* Les titres de films suivis d’une « * » concernent des films non éligibles aux Magritte du Meilleur film, du Meilleur film flamand ou du Meilleur film étranger en coproduction mais dans lesquels les acteurs et actrices belges précités tiennent des rôles importants. Le Conseil d’Administration de l’Académie André Delvaux a donc souhaité vous permettre de saluer leurs performances dans ces films-là également. Photo Trophée Magritte ©Reporters