Baccalauréat de Cristian Mungiu, passeport pour l’occident sans condition – En salle le 21 décembre

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Roméo est médecin dans une petite ville de Transylvanie. Sa fille, Eliza, est sur le point de passer son baccalauréat, ce qui devrait être une formalité car la jeune fille est extrêmement douée. Roméo a tout prévu et une fois l’examen en poche, sa fille partira en Angleterre étudier à l’université de Cambridge puisqu’elle y a été acceptée. Mais Eliza va se faire agresser et le précieux sésame sera remis en question. La vie de Roméo sera si bouleversée qu’il va en oublier les principes moraux inculqués à sa fille…

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Cristian Mungiu a remporté la Palme d’or au Festival de Cannes en 2007,  avec 4 mois, 3 semaines, 2 jours, drame bouleversant sur l’avortement clandestin en Roumanie. Il a obtenu cette année le Prix de la meilleure mise-en-scène avec Baccalauréat, un drame psychologique aux accents de thriller impressionnant de maîtrise. Le film questionne de nombreux sujets mais surtout celui de savoir jusqu’où on peut aller par amour pour ses enfants.
La famille Aldéa est incarnée par un trio de comédiens triés sur le volet. Maria Dragus (Le Ruban blanc de Michael Haneke) incarne remarquablement (la pas si fragile) Eliza, fille soumise que les événements vont pousser à se rebeller. Son père, interprété par Adrian Titieni (The Cage d’Adrian Sitaru, Le chêne de Lucian Pintilie), la cinquantaine, fait partie d’une génération désabusée par l’état de son pays et préfère que sa descendance s’en éloigne, comme s’il s’agissait de la sauver. Il abandonne aussi parfois son propre couple et se réfugie régulièrement chez sa maitresse Sandra, Malina Manovici. La mère Magda, Lia Bugnar, est un peu à l’écart de cette relation père-fille, en opposition à son mari elle ne souhaite pas que sa fille parte.

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On ne verra pas du tout l’agression de la jeune fille qui sera blessée au poignet, mais les éléments qui en résultent. On ne saura pas non plus ce qui s’est exactement passé mais ce qui intéresse l’auteur, ce sont les conséquences et la chaîne d’événements qui vont suivre, au-delà de l’enquête qui ajoute du suspens au récit. Les cadres sont parfaitement posés et les personnages interviennent dans les situations proposées de belle manière, dans des plans séquences rythmés par leurs allées et venues dans le récit.
Plusieurs thèmes comme celui de l’éducation enrichissent le récit : si l’on inculque des principes à ses enfants, parvient-on soi-même à les respecter ? Roméo a tout prévu pour sa fille mais est-elle réellement d’accord avec ses choix ? Le drame se fond dans la situation actuelle de la Roumanie en posant la question des valeurs. Faut-il tout faire pour quitter un pays où la corruption règne ? Les valeurs sont-elles plus belles ailleurs ? Peut-on soi-même résister à la corruption en cas de nécessité ?
« Il faut utiliser les armes d’ici » dira son père à Eliza. On est totalement en empathie avec Eliza si brillante élève, dont l’avenir est remis en cause stupidement par un événement aussi horrible qu’inattendu. On comprend son père tout en regrettant de le voir s’embourber dans un système corrompu. Finalement chacun évoluera suite à ces événements et les choses s’équilibreront.

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