Ismaël Vuillard, cinéaste, travaille à son prochain film qu’il est sur le point de tourner, à propos d’Yvan, un diplomate atypique inspiré de son frère. Ismaël se trouve perturbé par le retour de Carlotta, sa femme, disparue vingt ans plus tôt. Suite à ce retour, Sylvia, sa compagne, s’enfuit et Ismaël rejette Carlotta. Profondément bouleversé, Ismaël quitte le tournage pour retrouver sa maison familiale à Roubaix, assailli par ses fantômes.

Chef de file d’un cinéma d’auteur français intimiste, formé et issu de l’IDHEC (ancienne FEMIS), Arnaud Despleschin, Rois et Reine, Jimmy P, présente un drame grandiose, Les Fantômes d’Ismaël, projeté en Ouverture du Festival de Cannes, en Sélection Officielle et hors Compétition.

Dans un scénario aux histoires savamment tissées, co-écrit avec Léa Mysius et Julie Peyr, Arnaud Depleschin nous emmène dans des univers parallèles, celui de la fiction qu’imagine son personnage Ismaël à travers son écriture, celle d’un polar ou évolue Yvan, Louis Garrel, inspiré du son frère. La réalité de sa propre vie constitue une autre dimension du récit avec le personnage de Sylvia. On assiste également, comme lui, au retour de son passé à travers cette femme perdue et pleurée, Carlotta, épouse regrettée qui réapparait soudainement, vingt ans après sa disparition. Déclarée morte au bout de dix ans par Ismaël lui-même et son père, puisque la loi française prévoit qu’une personne disparue doit être déclarée décédée après dix ans.

Despleschin filme son acteur fétiche, Mathieu Amalric, sorte de double de lui-même qui incarne superbement Ismaël, auteur tourmenté par les aléas de sa vie et le retour d’une femme infidèle, Carlotta. Il magnifie ses comédiennes, qui crèvent l’écran. Charlotte Gainsbourg est Sylvia, troublante de naturel dans ce rôle, à la fois compréhensive et fragile face à cette situation surréaliste de voir ressurgir la femme de l’homme qu’elle aime. Marion Cotillard est parfaite en Carlotta, femme sans remords ni scrupules, qui campe sur ses positions dans la douceur et ce qu’elle imagine être son droit de reprendre sa place. La relation des deux femmes est très bien pensée et mise en scène. Soulignons une pléiade de bons acteurs en seconds rôles : Hippolyte girardot, Alba Rohrwacher, Laszlo Szabo, Jacques Nolot, Samir Guesmi…

Les fantômes d’Ismaël a de la hauteur, c’est un grand film. Arnaud Despleschin y mêle plusieurs histoires et plusieurs temporalités avec talent. On sent le regard bienveillant du cinéaste sur ses acteurs qui les met en scène avec amour pour les magnifier. Une superbe Ouverture pour ce Festival de Cannes 2017 !