The Old Oak de Ken Loach, une histoire de racines et d’humanité

The Old Oak est le troisième volet d’une trilogie tournée dans la région délaissée du Nord-Est de l’Angleterre, après I Daniel Blake et Sorry we missed you. Ken Loach réalise un film brillant. Un drame social comme il sait les raconter avec son comparse Paul Laverty au scénario, plus ambitieux que les deux films précédents. Un uppercut au coeur de la complexité humaine. Un long métrage courageux également, qui plonge dans un sujet sensible, l’arrivée de réfugiés syriens qui fuient la guerre et débarquent dans l’Angleterre profonde. De ses 87 ans, en grande forme, Ken Loach présentait The Old Oak en Compétition Officielle au 76ème Festival de Cannes. Il accompagne également au 50ème Film Fest Gent ce qui pourrait être son dernier film dit la rumeur, «Chaque chose en son temps » répond le cinéaste. (A lire aussi: Entretien avec Ken Loach).

2016, une bourgade au Nord-Est de l’Angleterre. Tommy Joe Ballantyne, dit TJ est le propriétaire du seul pub existant de la ville, The Old Oak, où il accueille volontiers les habitués. L’arrivée de réfugiés syriens fuyant la guerre dans leur pays va bouleverser les habitudes des villageois. TJ va faire la connaissance de Yara une jeune femme syrienne. Une amitié va naître entre ces deux personnages aux valeurs finalement pas si lointaines.

Personnage central du récit The Old Oak, le vieux chêne, pub d’un village du Nord de l’Angleterre est le poumon du village. Dans ce lieu aux racines plus profondes qu’il n ‘y parait, végète une arrière salle, une sorte de caverne d’Ali baba qui recèle de vieux souvenirs et constituent le socle de ce village et de ses habitants. Le film déploie un casting des plus justes. Dave Turner qui jouait déjà dans les deux précédents films du cinéaste, interprète TJ, un premier rôle où il est bouleversant. Ebla Mari, syrienne, prête avec brio son sourire à la délicate Yara, passionnée de photo. L’honnête Charlie, Trevor Fox, par son ambiguïté est l’un des protagonistes les plus intéressants du film.

L’émotion est au rendez-vous de ce film complexe. Ken Loach réussit une plongée au coeur de l’humain, avec ses défauts et ses qualités. L’observation intense de situations véridiques nourrissent profondément le récit. Des tensions se profilent et les habitants du village ne sont pas prêts à accueillir des étrangers. Ken Loach n’élude rien des différentes injustices qui se percutent. La pauvreté des enfants syriens n’élude pas celle des jeunes anglais avec un vélo ou de la nourriture que l’on offre aux uns et pas aux autres.

L’art a aussi sa place dans le récit. La photo est la passion de Yara qui est douée pour les portraits. Elle capte le regard des gens dans son objectif, en témoigne l’émouvante séquence de la diffusion d’un diaporama de ses photos dans le village sur une musique orientaliste. Les influences culturelles se mélangent pour le meilleur. Ken Loach révèle comme personne la solidarité. Il lie l’histoire et les luttes des mineurs de Grande Bretagne avec la survie des réfugiés syriens. Il les réunit pour en garder l’humanité commune. Un film qui retourne le cœur tant il sonne juste.